samedi 16 mai 2009

A Line in the Sand : un carnet de bord virtuel

En mars 2004, le sergent Chris Missick, du 319ème Bataillon de transmissions, lança son propre blog, A Line in the Sand. Dès sa mise en ligne, celui-ci connut un succès retentissant, son audience dépassant de loin celle des sites officiels (Département de la Défense, C-Span, etc.). Les grands médias firent largement écho à cette démarche inédite et ce, dans le monde entier (CNN, FoxNews, US Today, The Guardian, The Wall Street Journal, etc.) décelant le formidable potentiel de cette plateforme. Le projet était aussi novateur qu’ambitieux. « Jamais auparavant une guerre n’a été documentée de façon aussi immédiate », tel était le slogan aguicheur de Chris Missick sur son site. Il a fait mouche en décrivant l’Irak et les expériences des militaires à l’Américain moyen. Sa vision est celle d’un insider. C’est la perception subjective d’un soldat en opération, autrement dit un « ressenti ». La valeur documentaire est indéniable, mais des questions immanquablement surgissent quant au danger d’instrumentalisation : dans quelle mesure ce blog ne fut-il pas asservi à la communication de l’Armée US et du Pentagone ? Le doute est permis. Ce blog n’est malheureusement plus disponible en ligne. Mais il a fait l’objet d’un ouvrage collectif compilant les nouvelles du front[1] (Irak, Afghanistan) et a également inspiré un film éponyme (2004). De son domicile californien, Chris Missick, devenu docteur en droit, poursuit aujourd’hui son activité de blogueur. Il est devenu une marque déposée à lui tout seul, érigé en véritable icône patriotique. Un album-photos retraçant son affectation à la frontière koweitienne participe de cette « sacralisation ». L’enjeu ici ? Donner un aperçu du dévouement sans faille de l’officier étatsunien : Missick posant aux côtés de Donald Rumsfeld, le Secrétaire à la Défense, Missick et la statue décapitée du dictateur irakien, Missick hissant le bannière étoilée, … La mise en scène n’a rien à envier à un blockbuster hollywoodien. Indéniablement, le sergent Missick a joué les pionniers et jouit toujours d’une grande popularité dans son pays.

[1] Letters from the Front Lines: Iraq and Afghanistan, by Rear Admiral Stuart Platt, Greenville Island Press, 2006

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